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Laure Chapalain est responsable de la formation au motion design à Gobelins, l’école de l’image, depuis 2015. Il existe d’ailleurs plusieurs formations en Graphisme & motion design, à Gobelins.
Laure y donne également des cours. Elle a notamment une grande connaissance de l’histoire du motion design.
En outre, comme elle est spécialiste des génériques, Laure a créé l’association We Love Your Names, et elle organise chaque année La Nuit Du Générique.
Nous avions écouté avec grand intérêt une conférence de Laure pendant le festival Motion Motion, le 14 mai 2022. Comme nous avions encore beaucoup de questions à lui poser, elle a eu la gentillesse d’accepter une interview !
“Le motion designer a un côté bricoleur, système D.”
Formée à Penninghen
La formation en design graphique dure 5 ans. J’ai été diplômée en 2004 et, déjà à l’époque, on apprenait un petit peu After effects et un tout petit peu la 3D. Je fais partie d’une génération qui a été hyper inspirée par Michel Gondry donc pour mon projet de fin d’études, j’étais plutôt partie pour faire de la vidéo. Je m’étais dit que je ferai un clip.
Mais en dernière année, j’ai rencontré un professeur : Michel Bouvet, qui est affichiste. J’ai complètement changé d’idée et j’ai fait un livre pour mon projet !
Premiers contrats
Quand je suis sortie de l’école, j’ai travaillé aux bandes-annonces de France 5. Donc j’ai fait un peu d’After.
Mais après on m’a proposé un CDI dans une boîte de production de pub. Je pensais que j’allais faire de la vidéo et, en fait, je n’ai fait que des dossiers…
Quand je suis partie, j’ai retravaillé un peu pour les bandes-annonces de France 5. Mais au fur et à mesure, je me suis éloignée du motion design et j’ai fait que du print.
Implication à Gobelins
Je voulais être prof donc j’ai postulé à Gobelins.
Hervé Tissot, mon prédécesseur à Gobelins, voulait réorienter le BTS design graphique, très print, vers le motion design. Au début, on m’avait demandé de faire des cours d’After, et puis, finalement, Hervé Tissot m’a demandé de préparer une conférence sur les génériques de films. Il avait vu des conférences à Berlin, où on présentait les génériques de films comme l’origine du motion design. J’ai préparé cette conférence, qui a très bien marché. Et ensuite, j’ai fait d’autres interventions sur l’histoire du générique de film. Après ça, on a commencé à organiser des projections au Mois du graphisme d’Échirolles.
Donc j’ai fait de plus en plus d’interventions à Gobelins sur l’histoire du générique puis, plus largement, sur l’histoire du motion. Et j’ai suivi les projets que les élèves faisaient. Quand Hervé est parti à la retraite, il m’a conseillé de postuler. C’était soudain. J’avais 30 ans. Je n’avais pas du tout réfléchi au fait de m’impliquer plus dans l’éducation. J’ai réfléchi et puis… j’ai postulé ! Et en fait ça m’a beaucoup plu. Je fais ça depuis 2015, du coup, à temps plein.
Une formation au motion design vivante… comme le motion design lui-même
Comme l’histoire du motion design, ça recoupe : l’histoire du cinéma, l’histoire du cinéma d’animation… Il y a des livres qui ont été écrits aux États-Unis.
Donc j’ai acheté des livres. J’ai fait des recherches sur Internet. J’ai rencontré des spécialistes. J’ai acheté des DVD… Je picore partout !
Dans mes cours, je parle du précinéma. J’évoque les débuts du cinéma. Ensuite, je parle du cinéma expérimental. Je parle d’Oskar Fischinger, de Len Lye…
J’évoque aussi de tout ce qui est idents de chaîne de télévision.
Je parle des débuts de la 3D, de la stop motion.
Après avoir parlé du cinéma européen, du cinéma américain, de celui des pays de l’est, j’ai monté un cours sur le cinéma d’animation japonais, en faisant des ponts avec ce qui se passe en motion design.
Aujourd’hui, je me dis qu’il faudrait aussi que je fasse un cours sur le vidéo mapping et sur le VJing !
Le motion design : c’est quoi ?
Certains veulent mettre le motion design dans une petite case. C’est souvent des choses très institutionnelles : des petits bonshommes très schématiques, qui font très flat design et qui ne sont pas forcément super bien animés. Après ça peut être beaucoup plus travaillé avec des formes abstraites qui bougent super bien, avec des formes colorées, ou alors des choses pour la pub.
Kook Ewo, le fondateur de l’association Motion Plus Design, promeut le motion design, sous toutes ses formes. Il avait fait une vidéo, il y a très longtemps, pour expliquer ce qu’est le motion design. Et il disait que le motion design, ça peut être beaucoup de choses, du moment que tu animes (de la typo, de l’image). Mais pour lui, ça s’arrête au moment où il y a un personnage qui parle à la première personne : là, ça devient du cinéma d’animation. Je ne sais pas s’il est toujours d’accord avec cette définition, parce que c’était il y a longtemps !
À un moment, on disait aussi : « C’est par rapport aux logiciels : les animateurs, ils ne vont pas utiliser After effects. » En fait, maintenant, je vois ce qui sort de Gobelins en animation. Il y a du cinéma d’animation “classique” et il y a des mélanges de techniques.
Une vidéo en motion design, normalement, c’est pour communiquer. Pour moi, c’est ça, la différence avec un film d’animation.
Un film d’animation, c’est une œuvre d’art à part entière.
Pour une vidéo en motion design, il y a un commanditaire qui vous demande de faire un film pour communiquer autour de tel sujet.
En même temps, il y a des gens qui font du cinéma d’animation et qui travaillent pour de la pub donc… c’est compliqué.
Le motion design : c’est où ?
Il y a des publicités qui utilisent le motion design, les génériques de films et de séries aussi.
Il y a tout ce qui est idents, pour les chaînes de télévision. C’est quand même complètement lié au motion design !
Dans le métro, dès qu’on a des écrans, on a du motion design.
Sur YouTube aussi, il y a toutes les vidéos éducatives. C’est quand même très lié au motion parce qu’ils essaient de rendre les images le plus efficace possible pour : faire comprendre des concepts, des problèmes scientifiques… pour faire de la vulgarisation.
Après, il y a tout ce qui est institutionnel.
Et il y a toutes les illustrations qui sont animées sur Instagram. Il faut d’ailleurs que je regarde plus ce qui se passe sur Tiktok !
Ensuite, tout ce qui est vidéo mapping, c’est lié au motion design.
Tout ce qui est VJing aussi, c’est lié au motion design.
Et si le motion design, c’est le design du mouvement, le design de certaines applications, c’est très lié au motion !
La formation au motion design donnée à Gobelins
C’est clair que mes élèves ne rêvent pas de faire du design d’applications ! Mais il y en a quelques-uns qui bifurquent vers le design interactif.
Ce que veulent la plupart de mes élèves, c’est animer leurs propres illustrations.
Bien sûr, les productions qui sortent des Gobelins, en cinéma d’animation, n’ont rien à voir avec des productions des étudiants en motion design. Parce que nous, on est sur des temps courts : nos élèves produisent des vidéos en deux semaines ! Le motion designer a un côté bricoleur, système D.
Le projet d’examen, par exemple, c’est en deux semaines. Les élèves sont briefés par un commanditaire et, deux semaines plus tard, ils livrent une vidéo d’1 minute, 1 minute 30.
Les sujets sont divers et variés. Les étudiants de cette année ont fait cet examen pour CoCreate Humanity, une association qui aide les travailleurs humanitaires qui ont des troubles post traumatiques. Le but, c’était de sensibiliser les gens autour de des actions de CoCreate Humanity. J’avais 20 étudiants dans la formation donc ils ont demandé à 20 travailleurs humanitaires de leur donner un témoignage. Chacun a tiré au sort un témoignage qui faisait 1 ou 2 page(s). Et il fallait qu’ils fassent une vidéo à partir de ce témoignage. Ils ont choisi la direction artistique, le scénario.
Je suis scotchée par ce que les étudiants arrivent à faire en deux semaines !
Quand ils sortent, on leur dit qu’ils sont motion designers et on les voit souvent comme des techniciens. C’est vrai qu’ils ont été formés à l’utilisation de logiciels : Photoshop, Illustrator, InDesign, After Effects, C 4D… (Blender, on ne l’apprend pas pour l’instant, mais il faudrait, je pense !)
Mais ce ne sont pas seulement des techniciens : ils sont capables de bien plus ! On forme des étudiants à être de vrais directeurs artistiques, de vrais réalisateurs en fait, parce qu’ils savent tout faire. En plus, ils sont force de propositions.
Curieux de découvrir une des productions des étudiants pour CoCreate Humanity ?
Nous remercions vivement Laure de nous avoir accordé cette interview 😊
Pour en savoir plus sur le processus KUSUDAMA pour réaliser une vidéo explicative efficace en motion design, c’est par ici.